dimanche 20 mars 2011

Anxiolytiques et hypnotiques

Anxiolytiques et hypnotiques
 Les benzodiazépines (BDZs) constituent le traitement premier
des troubles du sommeil (hypnotiques) et des états d'anxiété sé-
vère (anxiolytiques). À doses élevées prises le soir, ces médica-
ments vont induire le sommeil et à doses faibles, fractionnées au
cours de la journée, une sédation et une diminution de l'anxiété.
Les BDZs possèdent des actions anxiolytiques, hypnotiques,
myorelaxantes, anticonvulsivantes et amnésiques (Cha-
pitre 25). Ces effets sont principalement dus à une augmenta-
tion de l'inhibition médiée par le GABA au niveau du système
nerveux central. Le GABA (e) libéré par les terminaisons ner-
veuses (supérieur milieu, ombré) se lie aux récepteurs GABA A
( ) dont l'activation augmente la conductance au CI- du neu-
rone (inférieur droit). Le complexe [récepteur GABAA-canal
chlorure] possède également des sites de liaison aux benzodiazé-
pines qui agissent comme modérateurs (U). L'occupation des
sites BDZ par les agonis tes des récepteurs BDZ (.) induit un
changement de conformation du récepteur GABA. Ceci augmen-
te l'affinité de la liaison au GABA et stimule les effets du GABA
sur la conductance au CI- de la membrane neuronale (inférieur
gauche). Les barbituriques agissent au niveau d'un autre site
et de la même manière, augmentent l'effet du GABA (pas illus-
tré). En absence de GABA, les BDZs et de faibles doses de bar-
bituriques n'affectent pas la conductance au CI-.

L'usage fréquent des BDZs s'explique par leur toxicité apparem-
ment faible, mais on sait actuellement qu'un traitement chroni-
que avec une BDZ peut induire des troubles cognitifs, une
tolérance et une dépendance. C'est pourquoi, pour le traite-
ment des troubles sévères de l'anxiété et du sommeil, on recom-
mande de limiter l'utilisation des BDZs à 2-4 semaines.
De nombreux antidépresseurs (ex. amitriptypline) sont éga-
lement anxiolytiques et n'induisent pas de dépendance. La bus-
pirone est un anxiolytique non sédatif qui agit sur les synapses
5HT. Les l3-bloquants peuvent être utiles dans les types d'anxiété
où les symptômes autonomes prédominent (ex. tremblements,
tachycardie, sueurs).
Différentes benzodiazépines sont vendues comme hypnotiques
(supérieur gauche) et anxiolytiques (supérieur droit). C'est
principalement la durée d'action qui détermine le choix du mé-
dicament. De nombreuses BDZs sont métabolisées par le foie en
métabolites actifs, qui peuvent présenter des demi-vies (t1l2)
plus longues que le médicament d'origine. Par exemple, le dia-
zépam (t 1l2 = 20-80 heures) a un métabolite actif N-déméthylé
(N-desméthyldiazépam) qui a une demi-vie d'élimination de plus
de 200 heures.
Les BDZs utilisées comme hypnotiques (supérieur gauche) peu-
vent être classées en 2 catégories: celles à action courte ou cel-
les à action prolongée. Une élimination rapide du médicament
(ex. témazépam) est généralement préférée car cela évite une
sédation au cours de lajournée. Un médicament à action prolon-
gée (ex. nitrazépam) peut être privilégié lorsqu'un réveil trop
précoce pose un problème et lorsqu'il est nécessaire d'avoir un
effet anxiolytique dans la journée. Le zopiclone bien que pré-
sentant une structure de type cyclopyrrolone agit au niveau des
récepteurs aux benzodiazépines. Ce médicament, plus récent,
possède une courte durée d'action mais ne montre aucun avan-
tage par rapport au témazépam en ce qui concerne le problème
de dépendance.
Les récepteurs GABA (Chapitre 22) de type GABA A intervien-
nent dans les effets des hypnotiques/anxiolytiques. Les récep-
teurs GABA A appartiennent à la grande famille des complexes
récepteur - canal ionique Oes récepteurs nicotiniques, les ré-
cepteurs à la glycine et les récepteurs au 5HT 3 constituent
d'autres exemples). Le récepteur GABA A se compose de 5 sous-
unités (en bas sur la figure). Des variants de chaque sous-unité
ont été clonés (six a, trois 13, trois y et une sous-unité Ô).
D'autres sous-unités existent mais il semble que la plupart des
récepteurs GABA A comportent deux sous-unités a, deux sous-
unités 13 et une sous-unité y. Le type principal est probablement
2a l ,2132'Y2 car les ARNm codant pour ces deux sous-unités sont
souvent colocalisés dans le cerveau. Des expériences électro-
physiologiques sur des oocytes de crapauds contenant différen-
tes combinaisons de sous-unités GABA A (produites par injection
de leur ARNm dans l'oocyte) ont montré que les récepteurs for-
més de sous-unités a- et 13- répondent au GABA Ga conductance
au CI- augmente) mais que la sous-unité Y2 est nécessaire pour
obtenir une réponse complète du récepteur aux BDZs.
Chez la souris, la sous-unité al serait particulièrement impliquée
dans l'action sédative des BDZs car une mutation ponctuelle dans
la sous-unité al (remplacement de l'histidine en position 101 par
l'arginine) abolirait l'action sédative du diazépam sans affecter
l'effet anxiolytique. Ceci implique que l'action sédative des BDZs
dépende d'autres sous-types de sous-unités a. Trouver un médi-
cament dépourvu d'effet sédatif, actif de façon sélective vis-à-vis
de certaines sous-unités et capable de diminuer l'anxiété chez
l'homme reste cependant, à l'heure actuelle, un défi.
D'autres médicaments qui se lient aux récepteurs des BDZs aug-
mentent l'anxiété. Ces médicaments sont appelés des agonistes
inverses. En absence d'un ligand, la plupart des récepteurs sont
supposés être dans un état de repos (Chapitre 2) mais les ré-
cepteurs des BDZs sont considérablement activés, même en ab-
sence de ligand. Les agonistes inverses sont anxiogènes car ils
induisent le passage des récepteurs des BDZs de l'état activé à
l'état de repos. Les antagonistes exercent le même effet ce qui
peut expliquer pourquoi les antagonistes BDZs (ex. flumazé-
nil) sont parfois anxiogènes et causent dans de rares cas des
convulsions, en particulier chez les épileptiques.
Le flumazénil est antagoniste compétitif des BDZs qui possède
une durée d'action courte et est administré par voie intravei-
neuse. Il peut être utilisé pour contrecarrer les effets sédatifs
des BDZs dans les anesthésies, les soins intensifs, les épreuves
de diagnostic et les surdosages.
Récepteur aux barbituriques. Les barbituriques sont de loin
plus dépresseurs que les BDZs car à dose élevée ils augmentent
directement la conductance au CI- et diminuent la sensibilité de
la membrane neuronale postsynaptique aux transmetteurs exci-
tateurs.
Les barbituriques ont été beaucoup utilisés mais constituent
aujourd'hui des hypnotiques et anxiolytiques obsolètes car ils
conduisent rapidement à une dépendance psychologique et
physique, sont des inducteurs des enzymes microsomiaux et un
faible surdosage peut être fatal (contrairement aux benzodiazé-
pines, pour lesquelles un surdosage important de BDZs ne pré-
sente pas d'effets sérieux à long-terme). Les barbituriques (ex.
thiopental, Chapitre 23) gardent par contre une place impor-
tante en anesthésie et sont toujours utilisés comme anticonvul-
sivants (ex. phénobarbital, Chapitre 25).
BENZODIAZÉPINES
Ces médicaments sont actifs par voie orale et bien que la plu-
part d'entre eux subissent un métabolisme oxydatif au niveau
du foie, ils ne provoquent pas d'induction hépatique (augmenta-
tion de l'activité d'une série d'enzymes hépatiques, N.D.T.). Ce
sont des dépresseurs centraux mais, contrairement aux autres
hypnotiques et anxiolytiques, leur effet maximal lorsqu'ils sont
administrés par voie orale, n'induit normalement pas de
détresse respiratoire sévère ou même fatale. Une telle détresse
peut cependant, se développer chez les patients qui présentent
une pathologie bronchopulmonaire ou chez qui l'administration
se fait par voie intraveineuse.
Effets indésirables. Les effets indésirables incluent une som-
nolence, une diminution de la vigilance, de l'agitation et de
l'ataxie, particulièrement chez les personnes âgées.
Dépendance. Un syndrome de sevrage peut s'observer chez les
patients qui ont reçu des BDZs, même durant de courtes
périodes. Les symptômes qui peuvent se manifester pendant
des semaines ou des mois incluent de l'anxiété, de l'insomnie,
une dépression, des nausées et des modifications perceptives.
Interactions médicamenteuses. Les BDZs ont des effets
additifs ou synergiques lorsqu'ils sont administrés avec d'autres
dépresseurs centraux comme l'alcool, les barbituriques et les
antihistaminiques.
Les BDZs administrées par voie intraveineuse (ex. diazé-
pam, lorazépam) sont utilisées dans l'état de mal épileptique
(Chapitre 25) et plus rarement au cours des crises de panique
(cependant, l'alprazolam oral est probablement plus efficace
pour cette dernière indication et présente une bonne sécurité).
Le midazolam contrairement aux autres BDZs, forme des sels
solubles dans l'eau et peut dès lors être utilisé comme sédatif
intraveineux au cours des endoscopies ou des interventions
dentaires. Lorsqu'elles sont administrées par voie intraveineuse,
les BDZs ont des effets amnésiques très importants. Les
patients peuvent ne garder aucun souvenir des examens désa-
gréables. Les BDZS administrées par voie intraveineuse peu-
vent induire une détresse respiratoire qui peut nécessiter une
ventilation assistée.
ANTIDÉPRESSEURS
Les antidépresseurs tricycliques comme l'amitriptyline pré-
sentent des effets anxiolytiques. Ils sont utilisés chez les
patients qui présentent une dépression et de l'anxiété de même
que chez les patients qui nécessitent un traitement à long terme
avec des anxiolytiques, situation où les BDZs peuvent causer
une dépendance. Les inhibiteurs de la monoamine oxydase, p.
ex le moclobémide, peuvent être spécialement utiles dans le
traitement des troubles de l'anxiété avec phobie. Les inhibiteurs
spécifiques de la recapture de la sérotonine, p. ex. le citalo-
pram, peuvent être efficaces dans les troubles de panique
(Chapitre 28).
MÉDICAMENTS AGISSANT SUR LES RÉCEPTEURS
SÉROTONINERGIQUES (5HT)
Les corps cellulaires contenant la 5HT sont localisés dans les
noyaux du raphé du cerveau moyen et se projettent vers de
nombreuses zones du cerveau y compris celles supposées jouer
un rôle important dans l'anxiété (hippocampe, amygdales, cor-
tex frontal). Chez les rats, les lésions des noyaux du raphé
induisent des effets anxiolytiques. Le rôle du 5HT dans l'anxiété
est appuyé par les données qui indiquent que les BDZs micro-
injectées dans le noyau du raphé dorsal diminuent le taux des
neurones activés et induisent un effet anxiolytique. Ces expé-
riences suggèrent que les antagonistes du 5HT pourraient être
des médicaments anxiolytiques utiles. La buspirone, un ago-
niste partiel de 5HT 1A présente des effets anxiolytiques chez
l'homme probablement en agissant comme un antagoniste au
niveau des sites postsynaptiques 5HT 1A dans l'hippocampe (où
il existe peu de réserves en récepteurs). La buspirone n'est pas
sédative et n'induit pas de dépendance. Malheureusement, son
effet anxiolytique ne s'observe qu'au bout de 2 semaines
d'administration et les indications de la buspirone ne sont pas
clairement établies.
L'hydrate de chloral est convertit dans l'organisme en tri-
chloroéthanol qui est un hypnotique efficace. L'hydrate de chlo-
ral peut induire une tolérance et une dépendance. Il peut
provoquer une irritation gastrique mais est moins susceptible
de s'accumuler que les BDZs.
Le chlométhiazole ne présente aucun avantage sur les BDZs de
courte durée d'action, excepté chez les personnes âgées, où il peut
causer moins de sensations de tête lourde. Il est administré par
injection intraveineuse en cas d'abstinence aiguë d'alcool et dans
l'état de mal épileptique. Le chlométhaziole induit une dépen-
dance et ne devrait être utilisé que pour une période limitée.

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